10 conseils pour des relations harmonieuses avec les ONG

La récente attaque de Nestlé par Greenpeace est une illustration supplémentaire de la puissance des ONG et de leur influence sur les entreprises. Je le répète souvent sur ce blog, pour les communicants dans les entreprises, la seule solution viable et capable d’assurer la tranquillité de votre entreprise est d’instaurer un dialogue constant avec toutes les parties prenantes. Les faciles comme les pénibles. De traiter le sujet en amont et de pacifier les rapports, parce qu’une fois que vous aurez été attaqué, il ne sera pas forcément trop tard, mais les choses seront beaucoup plus compliquées (ne serait-ce que parce que vous serez soupçonnés d’opportunisme).

Voici donc 10 conseils pour les entreprises et leurs communicants qui voudraient aborder des ONG et installer un échange fructueux. Ce ne sont que des conseils, 10 pensées issues de ma pratique et de ma connaissance de l’intérieur de plusieurs ONG. Elles ne doivent pas être considérées comme des règles strictes, ou comme les seules questions à se poser. Juste quelques recommandations !

– N’attendez rien en retour

On n’achète pas la paix avec une ONG. On la construit. Tout le budget et tout le temps que vous y consacrerez ne peuvent pas être considérés comme devant être automatiquement rentabilisés. L’ONG est complètement déconnectée de votre ROI ou de votre chiffre d’affaires, elle ne vous doit rien. Et il devrait être évident de dire que toute démarche d' »achat » des ONG se retournera immanquablement contre vous. Le marchandage sauvage (nous faisons ça en échange d’autre chose) n’a pas plus de chance d’aboutir.
C’est leur timing qui dicte le vôtre, pas l’inverse. Vous attendrez donc toutes les étapes de la concertation, et tant pis si un autre exercice budgétaire est entamé ou que vous voudriez communiquer sur une nouvelle gamme de produits.

– Ne vous lancez pas dans un débat de valeurs

Vous êtes sûrs de perdre. Vos valeurs sont certainement éloignées de celles des ONG, et c’est ce qui fait l’intérêt de la rencontre, mais la raison d’être des militants est de se battre pour des valeurs. Si vous leur contestez cela, il ne leur reste rien. Imaginez leur réaction naturelle, elle sera hostile, si pas violente. Les valeurs d’entreprise restent à la maison, les démonstrations de puissance aussi.

– Ne cachez pas ce que l’on vous demande de ne pas cacher

Il y a un ou des points dont vous êtes certains qu’ils ne vont pas plaire à votre ONG ? Déjà faut-il le savoir au moment où vous les contactez. Et manque de chance, ils mettent le doigt dessus ? Pas de souci. Votre entreprise n’est pas parfaite, et si vous les contactez, c’est que vous êtes prêts à changer certains points de vos produits ou pratiques. Vous êtes donc prêts à dévoiler ce qui ne fonctionne pas, ce qui n’a que peu d’importance, puisque vous demandez à l’ONG « comment est-ce que nous pouvons faire pour que nous soyons tous les deux satisfaits de la solution que nous allons trouver ? ». Si vous êtes dans une démarche de progrès et de concertation, l’ONG n’aura aucune raison d’en faire un scandale.

– Cherchez le bon interlocuteur (local ou national)

Selon votre but, la portée de votre entreprise, une même ONG devra être abordée soit par son groupe local, soit par le siège social. Deux spécificités : les locaux sont souvent moins au point techniquement, mais plus disponibles, ce qui peut être préférable pour le long terme. À l’inverse, le siège social a souvent moins de temps à vous consacrer, mais c’est là que l’on trouve la plus grande expertise. Le choix peut être important, parce qu’en cas d’erreur, vous risquez de passer du temps à être renvoyé de l’un à l’autre avant de trouver votre bonheur.

– Rendez-les co-producteurs d’une action

Le but ici n’est pas de « mouiller » l’ONG, mais de l’impliquer pour qu’elle comprenne bien toutes les contraintes auxquelles vous devez faire face. Vous serez surpris du degré de coopération que l’on peut obtenir de la plus redoutable association. Il suffit de lui donner un rôle réel, de la consulter sur des aspects importants. La limite à trouver n’est pas évidente…

– N’essayez pas de les tromper

Au risque d’enfoncer des portes ouvertes, l’évidence même est de ne pas chercher à manipuler ou à faire un coup derrière le dos des ONG (type : je consulte sur une modification de ma production, pour quelques mois plus tard créer une nouvelle gamme qui va faire exactement l’inverse de ce qui a été apporté par l’ONG en question – essayez avec l’huile de palme, pour une KitKatisation rapide). La manipulation ne fonctionne pas avec les ONG.

– Soyez humbles

Avouez votre ignorance de certains points, de certains impacts. Il n’y a aucune honte à dire que l’on manque d’informations, que l’on n’est pas sûr. Les ONG ont aussi leurs interrogations, elles ne croient pas détenir la vérité ultime sur tout. La curiosité et la recherche du dialogue avec des personnes compétentes ne peuvent que vous bénéficier, ne serait-ce que pour nouer facilement le contact.

– Échangez souvent

Je ne fais que reprendre un standard de la (bonne) communication de crise : si une action d’anticipation est efficace à un instant t, son effet se dilue dans le temps, et vous n’aurez plus ses bénéfices si une crise a lieu plusieurs mois ou plusieurs années après. Tant qu’à faire, choisir dès le début de s’inscrire dans une démarche de progrès, donc au moins sur du moyen terme, avec des étapes régulières, permet de ne pas se demander tous les quatre matins « et qu’est-ce qu’on va faire avec les ONG, maintenant ? ». Pour cela, il faut absolument savoir ce sur quoi l’on veut solliciter l’ONG.

– Allez vers l’ONG la plus compétente, pas la plus « facile »

Certaines ONG, certaines certifications (je pense notamment à Rainforest Alliance) brillent par leur « compatibilité » avec les entreprises. C’est-à-dire qu’elles sont suffisamment peu exigeantes pour que le minimum puisse aboutir à un succès apparent. Mais ce sont aussi les organisations qui ont le moins de crédibilité, ce qui affaiblit votre engagement. Sans compter que des problèmes peuvent rester, et là, d’autres ONG peuvent vous tomber sur le dos, avec d’autant plus de véhémence qu’elles auront senti l’odeur de la trahison.

– N’en faites pas un argument de communication

Le pire qui puisse arriver, ce serait que vous ayez franchi toutes les étapes brillamment, et qu’une fois la concertation terminée vous en fassiez le sujet d’une campagne d’affichage sur tous les murs de la cité. Ce serait risquer 1) un retour de flamme de l’ONG, et 2) de réduire considérablement vos marges de manœuvre dans le futur. Les relations avec les ONG doivent se faire dans la discrétion. Mais alors, quid du ROI et de la sacro-sainte visibilité recherchée par tous les communicants ? Est-ce rentable ? Comment justifier les budgets engagés ? Au risque d’aller contre certains dogmes, j’avancerais que c’est un des rôles du service communication de l’entreprise que de dépenser temps et argent pour les parties prenantes. L’intérêt ? Écarter les bâtons que vous pourriez prendre dans les roues, vous rendre moins vulnérable aux crises, réduire les risques de conflits. Impossible à chiffrer, mais essentiel.


Crédit photo : Global Integrity, sur Flickr, image mise à disposition sous un contrat Creative Commons by.

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