Guide communication responsable UDA/Medef : ça ronronne…

Sans tambours ni trompettes, au cœur de l’été, le Medef et l’Union des annonceurs (UDA) ont publié sur leurs sites internet respectifs un guide intitulé « Communication responsable des entreprises. Pour une relation de confiance avec les consommateurs ». Une certaine vision de la communication responsable.

Résumé des épisodes précédents : l’UDA a commencé à s’intéresser activement au développement durable vers 2003, avec le souhait de coller à la popularité naissante de cette thématique. Elle est à l’origine, en 2008, d’une charte d’engagement des annonceurs pour une communication responsable, et depuis d’une plate-forme recensant les « bonnes pratiques » des signataires. Mais en guise de bonnes pratiques, ce sont souvent des actions vagues, en décalage avec la stratégie de communication globale, imprécises ou juste mensongères, le tout pour donner l’impression que les grands annonceurs sont réellement en train de changer leur communication – ce qui est encore loin d’être vrai. Bref, la communication responsable selon l’UDA, c’était un peu une grande mascarade (mais qui m’a bien aidé). Et à présent ?

Une bonne base

L’intérêt de l’UDA pour le sujet est maintenant ancien. On peut donc s’attendre à une démarche approfondie. Il s’agit plutôt d’un état des lieux – rien de bien nouveau sous le soleil – avec un guide qui donne à la fois des éléments de compréhension du principe (le pourquoi) et quelques conseils sur la mise en pratique (le comment), mais surtout le cadre de la régulation et de l’auto-régulation. Tous les textes de référence y sont.

C’est donc une synthèse très professionnelle sur la forme comme sur le fond, qui constituera un bon point d’entrée pour les néophytes. J’y ai appris l’existence de codes de bonne conduite conçus par la Chambre de commerce international : code « sur les pratiques de publicité et de communication de marketing », datant de mai 2010, et « cadre des allégations environnementales ». Une bonne idée de lecture, tout en gardant à l’esprit que ce ne sont une fois encore que des codes facultatifs et bien souvent ignorés.

Mais

Hélas, il y a souvent un « mais » avec l’UDA. En l’occurrence, trois mais.

Le plus fondamental : la définition donnée veut que « d’une part, il s’agit de communiquer de manière responsable, y compris en tenant compte des récepteurs de la communication ; d’autre part il s’agit de communiquer sur des thèmes responsables. » Définition avec laquelle je suis en désaccord. Il ne s’agit absolument pas de toujours communiquer sur des thèmes responsables. Lire à ce sujet le très riche essai de Thierry Libaert, « Communication et environnement, le pacte impossible » (puf, 2010) : communiquer responsable, c’est justement savoir quand on peut utiliser l’argument de la responsabilité de l’entreprise, et quand cela serait contre-productif car mensonger.

Ce n’est pas qu’une subtilité réservée aux puristes. Cela signifie que selon ce guide, soit seul un tout petit nombre d’entreprises peut pratiquer la communication responsable (celles chez qui la RSE est au cœur du projet), soit si toutes le peuvent, toutes vont se mettre à parler responsabilité à tort et à travers. Greenwashing et compagnie, le retour.

Deuxième mais, l’UDA et le Medef proposent toujours une vision opportuniste de la communication responsable. On sent à demi-mot l’objectif de « réenchanter la communication » par des thèmes soi-disant fédérateurs (cf. « Communication et environnement » de T. Libaert, encore et toujours), comme si seuls les résultats de la communication responsable sur l’image des entreprises étaient intéressants, et pas la façon de procéder. Pas de miracle : il n’y a qu’un changement profond dans les pratiques qui permettra de renouer la confiance.

Enfin, une fois refermé ce guide, on a envie de dire aux membres de l’UDA et du Medef : « maintenant, à l’action ! » La différence entre ces bonnes intentions et la réalité de la communication des grandes entreprises est trop criante. Au final, il y a beaucoup de chances que ce ne soit qu’un guide de plus, qui finira comme ses congénères dans le fond d’un tiroir alors que quelques-uns le brandiront bien haut en disant : « regardez tout ce que nous faisons ». Peut-on encore croire en la réalité de cet engagement ?

 

Crédit photo : eye of einstein, sur Flickr, image mise à disposition sous un contrat Creative Commons by.

5 comments to “Guide communication responsable UDA/Medef : ça ronronne…”
    • Merci pour ce commentaire, Estelle. Cette étude mérite qu’on s’y attarde, elle révèle des changements de comportement intéressants à analyser. Mais dites-moi, quel rapport avec l’article ?

  1. Pas directement de lien, si ce n’est que les annonceurs vont forcément disséquer ce genre d’étude…
    En fait j’ai lu cette info ce matin et j’ai de suite pensé à ce blog, c’est tout 😉
    alors je l’ai mis sur l’article le plus récent…
    bonne continuation

    • Merci d’avoir pensé à moi ! 🙂

      Oui, les annonceurs (et les agences) vont se pencher dessus, la question c’est : comment vont-ils exploiter ces données ? Coller aux tendances sans travailler sur les pratiques de communication ne fera qu’accroître le discrédit envers les marques sur ce sujet…

  2. Pingback: Communiquer Durable » Archives » Revue de web – 05.10.2011

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